A propos des décideurs de la guerre contre le Niger
Les mensonges des Agents de la FrançAfrique


La question de la guerre décidée par la CEDEAO lors de son sommet extraordinaire du 29 juillet 2023 contre le Niger, suite au coup d’Etat du 26 juillet de renversement du pouvoir de Bazoum, a suscité les prises de positions des différentes forces politiques ; du Parti Communiste du Bénin à l’UDBN et à l’UPR en passant par les FCBE, le parti Les Démocrates, des personnalités indépendantes, des responsables syndicaux, sans oublier le gouvernement et ses porte-parole. Les représentants des différentes classes et couches sociales, des classes dirigeantes jusqu’à celles populaires se sont alors prononcés. Ce que l’on peut retenir c’est qu’à part le gouvernement et ses porte-parole officiels, l’ensemble des prises de position marque l’opposition ouverte à cette guerre insensée et condamne les sanctions de guerre contre le Niger. Mais une analyse des différentes positions exprimées révèle des différences notables, notamment en ce qui concerne l’identification et la dénonciation des fauteurs de guerre et les intérêts qui les meuvent et par conséquent la position face à ces intérêts.


Le Parti Communiste du Bénin, dès le 28 juillet 2023, dans une « DECLARATION portant MISE EN GARDE SOLENNELLE A PATRICE TALON CONTRE LA PARTICIPATION DE NOTRE PAYS A TOUTE INTERVENTION MILITAIRE » a dénoncé « qu’une agression militaire se prépare contre le peuple frère du Niger et c’est l’impérialisme français qui est à la manœuvre ». (Cf. La Flamme 512 du 28 juillet 2023). Dans une Adresse en date du 11 août 2023 au Président Patrice Talon, « A propos de la guerre et des sanctions de guerre contre le Niger », le premier secrétaire du PCB, Philippe Noudjènoumè a indiqué : « A l’évidence les intérêts en jeu ici sont ceux des puissances extérieures, la France en particulier. Autrement dit, ce sont les intérêts colonialistes français, pour les richesses minières et particulièrement l’uranium qui poussent à cette guerre fratricide. Vous voulez engager le peuple béninois à aller étouffer le peuple du Niger pour les intérêts stratégiques de la France. Ce n’est pas pour rien que la France a aussitôt déclaré, qu’elle « soutient, entièrement la décision de la CEDEAO ». (Cf. La Flamme n° 513 du 1er septembre 2023) »


Le parti Les Démocrates dans ses prises de positions, tout en condamnant toute prise du pouvoir par la force (s’alignant ainsi sur l’argument officiel principal des décideurs de la guerre contre le Niger), s’est opposé à toute guerre contre le pays frère Nigérien. Mais dans aucune de ses prises de positions et notamment dans son long discours à son meeting du 16 septembre 2023, le Chef du parti Les Démocrates n’a indiqué l’impérialisme français comme l’instigateur et l’organisateur de la guerre. Son discours s’adresse à Talon comme l’auteur. C’est le même discours que tiennent tous les hauts-bourgeois non au pouvoir.


Dans le troisième groupe d’opposants à la guerre contre le Niger, on peut citer les éléments au sein de la mouvance présidentielle dont le prototype est Bertin Koovi. Pour ces derniers, la guerre est décidée par la CEDEAO et non par Talon. Les partis de la mouvance, l’UDBN, l’UPR de Djogbénou ou des personnalités comme Robert Dossou tiennent le même discours.


Ainsi on se trouve, parmi les opposants à la guerre contre le Niger, devant trois positions différentes :
1- C’est la France qui est l’instigateur de la guerre contre le Niger et la CEDEAO ainsi que des chefs d’Etats de cette institution, comme Talon et autre Ouattara, en sont des instruments ;
2- C’est Talon qui est l’auteur de la guerre ;
3- Talon n’en est pour rien, c’est la CEDEAO.


Or, tout le monde sait et les théoriciens de la guerre le soulignent : la guerre est le prolongement de la politique par d’autres moyens, les moyens violents en particulier. Quelle politique et quels intérêts amènent à la déclaration de guerre au Niger ? Tel est le fond de la question.
Ouvertement, le président français, Emmanuel macron a déclaré haut et fort que la France a des intérêts stratégiques au Niger et qu’il est prêt à les défendre si le nouveau pouvoir au Niger les touche. Jusqu’à ce jour, il refuse de reconnaître l’état de fait, maintient le prétexte de guerre : le rétablissement de l’ordre constitutionnel avec le retour de Bazoum au pouvoir. Ce que curieusement, il n’a pas exigé du pouvoir putschiste au Gabon. Ce n’est donc pas la défense d’un ordre constitutionnel ni même le retour de l’ancien président Bazoum que défendent les impérialistes français, mais la facilitation du pillage des ressources du Niger remise en cause par les nouvelles autorités avec la dénonciation des accords de défense notamment et la politique de pillage. Ainsi donc, la position du PCB, qui dénonce l’impérialisme français comme l’instigateur de la guerre contre le Niger est conséquente et fondée.


La position des éléments du pouvoir, à savoir celle de Koovi, Djogbénou et autre Robert Dossou excusant Talon et rejetant toute la responsabilité sur la CEDEAO est tellement inconsistante que le peuple n’en est pas dupe. Le peuple a toujours en mémoire que Talon a rejeté et refusé d’appliquer des décisions de la CEDEAO le condamnant lui et son pouvoir de dictature autocratique. Bertin Koovi lui-même a dû avouer dans un de ses nombreuses interventions que partout le peuple rejette cet argument. Sans ambages, les Koovi et autre Robert Dossou montrent qu’ils sont liés aux intérêts français et à Talon.


Mais qu’en est-il de la position du parti Les Démocrates, celle qui s’oppose à la guerre, mais se refuse à doigter l’impérialisme français comme l’instigateur principal, indique et attaque uniquement Talon. Le parti Les Démocrates par cette position couvre évidemment l’impérialisme français, d’une part en reprenant l’argument de rejet de toute prise de pouvoir par la force (donc par exemple le renversement du pouvoir assassin et dictatorial de Blaise Compaoré à la suite de l’insurrection du peuple burkinabè en octobre 2014), mais surtout en ne soutenant pas le peuple et la jeunesse du Niger en insurrection ouverte contre les bases et intérêts français au Niger, d’autre part. Cette organisation qui se dit un parti du peuple ne défend pas le droit du peuple du Niger contre les provocations quotidiennes, inadmissibles de guerre du président français Emmanuel Macron. En taisant le nom de l’impérialisme français, instigateur et fauteur de guerre contre le Niger et auparavant contre le Mali, le Burkina-Faso, les responsables du parti les Démocrates, Éric Houndété et Boni Yayi renouvellent leur fidélité au maitre comme agents de la FrançAfrique. Que Talon au Bénin, comme Ouattara en Côte-d’Ivoire ou Maky Sall au Sénégal ait une responsabilité dans cette guerre contre le Niger, il n’y a aucun doute ; mais ceux-là sont des agents, des exécutants, sans rôle décisif dans le déclenchement et la conduite de la guerre. Que Talon se couche devant l’impérialisme français afin de sauvegarder ses intérêts et son empire économique et financier et tenter de protéger son pouvoir de plus en plus isolé et branlant, c’est un fait. Mais c’est la France qui "joue" tous ces Chefs d’Etat comme des pions sur l’échiquier régional et international. Du reste, c’est la France, détentrice des bases militaires au Sénégal, en Côte-d’Ivoire et récemment au Bénin qui arme, forme et coordonne avec ses amis de l’Otan les forces de la guerre. Oublier de doigter celui qui a un tel rôle décisif, celui qui arme et coordonne l’agression, c’est finalement tromper le peuple sur la véritable cible, la cible principale à vaincre pour la souveraineté du Niger et des peuples d’Afrique et du Bénin.

Car tout l’enjeu est là : le peuple du Niger est-il souverain ou pas ? Les peuples d’Afrique francophones sont-ils souverains ou pas. Ce que contestent justement la France et ses autorités néocoloniales dans la défense de la facilitation du pillage, c’est la souveraineté du Niger, c’est le droit du Niger, tout comme au paravent le droit du Mali, du Burkina de décider de leur sort, de choisir les partenaires qu’ils veulent et que seuls les peuples de ces pays ont le droit de contester et de se donner les dirigeants de leur choix.


En ne désignant et en ne condamnant pas l’impérialisme français comme l’instigateur de la guerre contre le Niger, les agents de la FrançAfrique et notamment les dirigeants du parti Les Démocrates, Éric Houndété et autre Boni Yayi confirment qu’ils sont les ennemis de la souveraineté et de l’indépendance véritable du Bénin et des peuples africains.

Clénon K.