DECLARATION
A PROPOS DE LA SITUATION POLITIQUE NATIONALE ET LES EXIGENCES ACTUELLES
DES TRAVAILLEURS, DE LA JEUNESSE ET DU PEUPLE

 

1- Le 27 août 2018, dans une "plainte adresse" à l’Autorité Nationale de Lutte contre la Corruption (ANLC) et diffusée à l’attention de l’opinion nationale et internationale, une citoyenne écrit : « accusations contre Monsieur Patrice Talon, Président de la République pour corruption, enrichissement illicite et autres infractions connexes ». A l’appui de cette "plainte adresse", il est indiqué, sur la base de pièces et annonces de l’Agence de Promotion des Investissements et des Exportations (APIEx, chargée de la création d’entreprise, modifications de statuts), que le Président Patrice Talon est toujours, juridiquement propriétaire et/ou administrateur de nombreuses sociétés unipersonnelles ou anonymes d’investissement financier (SCP), de coton (CCB), d’intrants agricoles (SDI), de gestion immobilière (SIGIB), de contrôle des importations (Bénin Control), etc., sociétés desquelles il avait déclaré s’être retiré.
Quelques jours après la publication de cette plainte, on apprend que le Dg de l’APIEx est limogé de son poste, pendant qu’on observe un silence radio de la part de l’Anlc, structure sous tutelle du Président de la République et sans qu’il ne soit publié aucun démenti des graves accusations portées contre le Président Patrice Talon qui « choisit consciemment de continuer à baigner dans un océan de conflits d’intérêt. »
Conclusion : Patrice Talon, Président de la République et Chef de l’Etat du Bénin, reste et demeure Chef d’entreprises et passible à cet égard de crime d’atteinte à l’honneur et à la probité.

2- Le 28 août 2018, Philippe Noudjènoumè, (prenant en compte les inquiétudes que suscite le glyphosate qui est importé, distribué et utilisé en grande quantité notamment pour la culture du coton et dont le caractère cancérigène est de plus en plus attesté), a écrit une lettre adresse à l’attention du Chef de l’Etat, Patrice Talon pour lui demander, par principe de précaution : de faire interdire et arrêter immédiatement l’usage du glyphosate sur toute l’étendue du territoire du Bénin et de diligenter immédiatement une étude (avec l’implication de laboratoires neutres et crédibles) pour cerner toutes les conséquences, sur la santé de notre population et l’environnement, de l’usage pendant des décennies de ce produit toxique.
Suite à cette lettre adresse au Chef de l’Etat et pendant que le gouvernement continue dans le déni des graves nuisances du glyphosate, de nombreuses voix s’élèvent dans des interpellations, contre le silence, l’inaction coupable et la poursuite de ce qui apparaît de plus en plus comme un assassinat de masse et un empoisonnement public dans le cadre de la culture du coton dont le Chef de l’Etat et son entourage tirent les plus grands bénéfices.
Conclusion : On constate de la part du Chef de l’Etat un mépris de la santé et de la vie humaine ainsi que de la protection de l’environnement au bénéfice des profits privés et personnels.
3- Début septembre 2018, dans des artères des villes et notamment à Cotonou, et sur de grands panneaux publicitaires, on peut lire l’interpellation publique ci-après du gouvernement de Talon : « Pour une gouvernance transparente au Bénin, publiez les contrats des marchés publics et de partenariat public-privé ; conformément au décret n° 2015-035 du 29 janvier 2015 portant code de transparence dans la gestion des finances publiques en République du Bénin ». Cette campagne s’inscrit dans le "Projet G0114 : Veille citoyenne du PAG" de l’ONG Social Watch. Ainsi, même ceux-là qui sont prêts à accompagner le pouvoir de Talon dans la mise en œuvre de son programme d’actions sont obligés de constater, ouvertement devant l’opinion nationale et internationale, l’opacité totale de sa gestion et de lui demander des comptes.
Conclusion : La gouvernance de Talon est hors la loi, dérogeant à toutes les normes de transparence et donc de redevabilité.
4- Le 14 septembre 2018 a été publié le Rapport 2018 sur l’Indice de développement humain (Idh) du programme des Nations-Unies pour le développement (PNUD). Dans ce rapport, le Bénin, sous Patrice Talon, occupe la 163ème place sur 189 pays, en recul de deux places par rapport à 2017. Sans équivoque aucune, est constatée la dégradation des conditions d’existence et de vie dans notre pays où le revenu par habitant (à parité du pouvoir d’achat) s’élève à 1165 frs cfa. Et c’est dans un tel pays que des lois électorales exigent des cautions financières de plusieurs centaines de millions de francs cfa ! Qui peuvent disposer de telles possibilités, si ce n’est en majorité des trafiquants de toutes sortes qui pillent et ruinent le pays ?
Conclusion : la faim et la dégradation des conditions de vie des populations après plus de deux ans de règne du pouvoir de Talon ne peuvent plus être cachées.
5- C’est sur ces maigres revenus que le pouvoir multiplie la prédation par de nouvelles taxes et impôts décidés même en dehors de l’Assemblée nationale. Ainsi en est-il des hausses vertigineuses des taxes iniques sur les péages des routes, sur les documents administratifs dans les tribunaux et les mairies, dans les marchés, dans les universités publiques et sur les communications électroniques. Un véritable racket d’Etat des populations est ainsi quotidiennement opéré sur les maigres revenus des populations, entravant l’activité des artisans, des vendeurs et vendeuses des marchés, des jeunes.
6- De partout fusent les dénonciations des lois portant Charte de partis politiques et code électoral en République du Bénin. Avant même leur examen par l’Assemblée, nombre de constitutionalistes, venant en appui aux forces sociales et politiques, ont dénoncé le caractère anti-démocratique, censitaire, d’exclusion, ploutocratique de ces deux monstrueuses lois jumelles portant soi-disant réforme du système partisan. Comment une condamnation à une peine de trois mois même avec sursis enlève au citoyen son droit civique d’électeur et par conséquent d’éligibilité ? Peut-on qualifier autrement de lois anti-démocratiques, d’atteinte grave à la liberté d’association et aux droits politiques, une Charte des partis et un code électoral qui rejettent des alliances de partis politiques aux élections ?
Quel type de République instaure finalement cette réforme du système partisan au Bénin avec une Charte des partis et un code électoral qui soutiennent des cautions financières aux élections d’un montant de 250 millions de frs cfa, équivalant à plus de 200.000 fois le revenu moyen par habitant de 1165 frsc cfa ? Pas une République démocratique, mais une ploutocratie, une République de riches dans un Bénin gangréné de trafiquants mafieux.
Il était déjà constaté au fil des ans et réprouvé, le rôle prépondérant de l’argent dans la vie politique au Bénin. Les ploutocrates avec leurs télécommandes non vertueuses étaient déjà à l’œuvre. Patrice Talon officialise et légalise cette mince couche de riches mafieux comme base sociale de sa dictature.
Conclusion : Talon a achevé la destruction des libertés et de la démocratie, et instaure une République de riches mafieux.
7- Le 13 septembre 2018, les travailleurs, à l’appel de la CSTB et de l’UNSTB, sont descendus dans les rues de Cotonou pour protester contre la politique anti-sociale du gouvernement, « le vote de lois scélérates consacrant la privatisation progressive de la fonction publique et la précarité de l’emploi… la remise en cause des libertés fondamentales consacrées par la Constitution et les conventions internationales, notamment le droit de grève ». A cet appel, ont répondu également de nombreuses femmes, des jeunes, pour crier la faim qui tenaille les familles. Sur les campus universitaires s’observent les actes de rejet des frais d’inscription exorbitants et discriminatoires. Les démocrates de la diaspora multiplient les protestations et inaugurent des actions de sit-in sur les représentations diplomatiques du Bénin à l’étranger. A travers des initiatives qui se répètent, des jeunes dénoncent dans des publications, la politique de dictature autocratique et régionaliste du pouvoir en place. Ces initiatives suscitent la hargne des autorités et de la police politique, confirmant du coup, le caractère dictatorial du pouvoir en place.
8- Ce qu’indiquent ces prises de positions, rapports, protestations et manifestations, c’est d’abord l’échec d’un pouvoir dans tous les domaines et dont l’existence est désormais vivement vécue chaque jour par le peuple avec angoisse, souffrance et torture. Ce qu’indiquent ces rapports et protestations, c’est qu’au-delà d’une crise économique, sociale et politique, le pays est plongé dans une crise morale sans précédent, où le Chef de l’Etat demeurant Chef d’entreprises, dirige le pays et gère les affaires publiques dans une opacité totale au profit de ses intérêts et de ceux de ses associés ; il a détruit le système démocratique, officialisé un régime ploutocratique et piétine les libertés aux travailleurs, à la jeunesse et au peuple considérés désormais comme des sujets taillables et corvéables à merci. La fraude et le mensonge d’Etat règnent dans cette opacité allant jusqu’à des actes de tricherie de truands qui, découverts notamment dans le domaine du football à l’international, font la risée et la honte des Béninois. Quelle garantie de transparence, de crédibilité un tel pouvoir peut-il offrir en ce qui concerne des élections? Aucune. Les télécommandes réunies dans les mains du pouvoir de la ruse et de la rage et avec toutes les institutions de contre-pouvoir vassalisées, consacreront des hold-up électoraux.
9- Ce que visent par conséquent les protestations et les manifestations actuelles des travailleurs, de la jeunesse, c’est la fin de cette gouvernance qui sème la faim et la désolation au Bénin au profit d’une infime couche de prédateurs autour du dictateur. Le peuple veut notamment :
- la suppression de toutes les taxes iniques sur les péages routiers, dans les marchés, les ateliers, sur les documents administratifs, sur les communications téléphoniques, sur l’inscription dans les universités publiques ;
- la suppression de toutes les lois et décrets liberticides et d’exclusion sociale : loi portant charte des partis politiques, loi portant code électoral, lois consacrant la privatisation de la fonction publique, loi portant exercice du droit de grève au Bénin, loi sur l’embauche, loi sur les collaborateurs extérieurs, loi portant partenariat-public privé pour l’élaboration d’une nouvelle loi portant partenariat-public-privé, etc.
- la libération immédiate des détenus politiques et la fin des poursuites des opposants politiques sous de faux mobile de droit commun en lieu et place d’une lutte équitable contre la corruption ; la création d’une commission pour l’étude des déguerpissements barbares intervenus depuis l’année 2017 avec indemnisation et relogement des victimes ; le rétablissement des bourses et secours universitaires pour les fils des pauvres.
- la fin de la privatisation des entreprisses et services publics et le retour des entreprises stratégiques dans le giron de l’Etat ;
- la réunion des Etats généraux pour le rétablissement de la démocratie et de nouvelles bases pour notre vivre ensemble au Bénin et pour une gouvernance patriotique et de probité.
10- Le Parti Communiste du Bénin soutient par conséquent toutes les actions et manifestations protestataires des travailleurs, des jeunes, des démocrates et patriotes tant à l’intérieur du pays que dans la diaspora. Il condamne tous les actes d’intimidation et de répression du pouvoir aux abois contre les jeunes et les travailleurs protestataires. Il appelle le peuple à renforcer ses organisations combattantes pour délivrer notre pays des mains du pouvoir de dictature autocratique, de pillage et de famine de Patrice Talon.
Cotonou, le 21 septembre 2018
Le Bureau Politique

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