Fraudes au cours des élections professionnelles dans le secteur de l’éducation au Bénin les 29 et 30 mars 2024 : Signes avant-coureurs pour les élections générales de 2026


Les 29 et 30 mars 2024, se sont déroulées les élections professionnelles sectorielles au niveau du Ministère des Enseignements Maternel et Primaire (MEMP) et celui de l’Enseignement Secondaire, Technique et de la Formation Professionnelle (MESTFP). Au total, 05 candidatures d’organisations syndicales ont été enregistrées au MEMP et 03 pour le compte du MESTFP. Les fédérations syndicales de toutes les principales Confédérations (CSTB, COSI, CSA, etc.) y ont participé avec des candidats.


Par ce scrutin, toutes les catégories d’enseignants à l’exception des AME ainsi que le personnel administratif ont été conviés à choisir leurs représentants dans les commissions administratives paritaires (CAP) et au niveau des différentes structures représentatives au plan départemental, communal et au niveau des circonscriptions scolaires. Selon le code électoral ayant conduit ces élections, seuls les listes ayant réuni au moins 20% des suffrages valablement exprimés seront éligibles à l’attribution des sièges pourvus aux plans national, départemental et au niveau des Circonscriptions scolaires des Enseignements maternel et primaire.
La forme de vote imposée est le vote électronique. Seule la Fésen/CSTB a combattu ce vote électronique et exigé le vote manuel, parce que le vote électronique n’est contrôlable par aucun votant. Le gestionnaire de la machine électronique (le fameux prestataire) qui enregistre l’électeur et son vote, compte les voix et proclame les résultats n’est contrôlable que par le pouvoir organisateur des élections. La CSTB en a fait l’expérience à l’occasion des élections professionnelles générales de 2021 où le pouvoir a pu minimiser son score en privant des milliers de militants d’accès à la plate-forme de vote et en organisant la fraude pour racheter ces pions comme représentants.
Malgré les protestations de la Fésen/CSTB, les autorités au pouvoir ont imposé ce vote électronique, avec l’appui des Fédérations de la CSA, de la COSI et autres.
A l’issue de ces scrutins, les résultats annoncés sont les suivants :
- Au MEMP : l’Alliance Aube Nouvelle de Anselme AMOUSSOU (SG/CSA-Bénin) obtient 45,12% du suffrage (seule représentative)
- Au MESTFP : la COSYNTRA-MESTFP de Noël TCHADARE de la COSI-Bénin obtient 56,18% et l’Alliance Aube Nouvelle 31,64% du suffrage exprimé.
- Aucun syndicat affilié à la CSTB n’a pu réunir au moins 20% des suffrages exprimés au niveau primaire comme au secondaire pour être représentatif.
Alors, les dénonciations fusent, le pot aux roses est mis à nu :


Premièrement : En plus du mode de vote officiellement convenu, le gestionnaire de la plate-forme a introduit un autre mode de vote permettant de voter en lieu et place de tout enseignant sur la liste électorale. Noël Chadaré de la COSI, dans un communiqué en date du 1er avril 2024 confirme: « Lors du vote blanc auquel toutes les parties ont été associées, il a été convenu d’accord partie que seul le vote pas SMS est retenu dans le cadre des scrutins des 29 et 30 mars 2024. Mais paradoxalement, il a été constaté ce qui suit : pendant toute la durée du scrutin, soit de 00h à 23h 59 mn, le vote par authentification biographique non retenu a été rendu possible. Par conséquent, il a été possible de voter en lieu et place de nombreux électeurs à leur insu. Ainsi, de nombreux travailleurs, ayant décidé d’exprimer leur vote se sont vus incapables de le faire ». Et ce mode de fraude a été mis à la disposition de l’Alliance Aube Nouvelle de la CSA d’Anselme Amoussou au MEMP le 29 mars et à la COSYNTRA-MESTFP de la COSI de Chadaré le 30 mars de 00h à 02h de matin. C’est ce qui explique le score de ces deux centrales.


Deuxièmement : Le gestionnaire de la plate-forme ferme l’accès aux électeurs dont le vote a été déjà volé.
Troisièmement : Le gestionnaire de la plate-forme a reconnu qu’il peut annuler le vote de n’importe qui. Cela a été explicitement avoué par lui en réponse aux protestations lorsqu’il a été découvert, preuve à l’appui la nuit du 30 mars qu’il a introduit un mode où l’on peut voter à la place d’un autre. Il a, à cet effet demandé que l’on lui communique les références des victimes et qu’il pourra annuler leur vote précédent.


Quatrièmement : C’est le gestionnaire de la plate-forme qui compile les votes et proclame les résultats globaux sans possibilités de vérifications ni de recours.


Conclusion : c’est le gestionnaire de la plate-forme qui est le seul maître du jeu lors du vote électronique. C’est ce qui s’est passé à l’occasion des élections professionnelles des 29 et 30 mars 2024 dans l’enseignement primaire et secondaire et répété à l’enseignement supérieur le 04 avril 2024.


Cette fraude organisée, ce n’est pas seulement la Fésen/CSTB qui la dénonce, mais également les bénéficiaires de la fraude. En effet, après le communiqué de dénonciation de la fraude par la Fésen/CSTB dans la nuit du 30 mars 2024, le SG de la CSA Anselme Amoussou et celui de la COSI, Noël Chadaré la dénoncent également. Anselme Amoussou écrit : « Si au MEMP, les élections se sont déroulées sans anicroche, le scrutin du 30 mars a été entaché de graves irrégularités que vous avez commencé à porter à notre connaissance dès le lancement du vote. A bon droit, vous exprimez depuis lors votre indignation contre ce qu’il convient d’appeler la gabegie électorale au MESTFP.» En réplique à Anselme Amoussou qui manifestement veut protéger les butins de la fraude, Noël Chadaré de la COSI rappelle le mode convenu qui a été dédoublé par un autre mode réservé à certains pour conclure : « Le dispositif de vote est devenu une véritable passoire car, ne garantissant aucune sécurité, la porte étant ouverte à un vote massif et frauduleux… On peut se rendre à l’évidence que les résultats du scrutin au niveau du sous-secteur des enseignements maternel et primaire sont entachés d’énormes irrégularités et ne sont pas de nature à garantir la fiabilité du vote. La COSI-Bénin... exige, au vu des faits avérés, une annulation pure et simple du vote au MEMP et sa reprise dans un délai raisonnable avec toutes les garanties de sécurité. Elle exige également qu’une enquête soit ouverte pour situer les responsabilités et sanctionner les auteurs de cette forfaiture indigne d’un pays qui se respecte... »


On sait, par expérience que lors des élections avec vote manuel organisées par les pouvoirs antipopulaires et autocratiques, la machine à fraude tourne à plein régime depuis les listes électorales, les achats de conscience, les bureaux de votes fictifs, les bourrages d’urnes, les comptages frauduleux, les proclamations des résultats et les jugements des instances de recours à la tête du client, sans parler du système d’exclusion des élections par voie législative, administrative et financière.


Les élections professionnelles sectorielles des 29 et 30 mars 2024 par vote électronique sous l’autocratie ont également révélé la machine à fraude pour nommer les représentants dociles au pouvoir dans les institutions de dialogue et de négociation. Si simplement pour le choix des représentants des travailleurs dans les instances de dialogue et de négociation, le pouvoir met en place sa machine de fraude, qu’en sera-t-il alors des élections générales de 2026 pour le choix des dirigeants du pays ?


Les élections professionnelles sectorielles des 29 et 30 mars 2024 apparaissent bien comme des signes avant-coureurs pour les élections générales de 2026 sous la dictature autocratique de Talon.
Brieux.

 

Extrait de La Flamme N°544 du 05 Avril 2024,