Encore à propos du CAMES et des positions du PCB.
Opinion de Jean Kokou ZOUNON


OPINION
ENCORE A PROPOS DE LA NATURE DU CAMES ET DES POSITIONS DU PCB

Dans son dernier numéro (n°491 en date du 03 mars 2023), La Flamme a publié une OPINION du Professeur Philippe NOUDJENOUME traitant des différents points à polémique soulevés par les déclarations de Patrice Talon lors de l’installation le 17 février 2023 de la "Délégation Générale au Contrôle et à l’Ethique dans l’enseignement supérieur". Dans cette OPINION sous-titré « Ni zélateur du CAMES, ni défenseur des mesures trompe-l’œil du Président Patrice Talon », il a démontré et dénoncé de façon méthodique, 1) Comment le pouvoir de la Rupture par ses réformes, œuvre ardemment à tuer l’institution universitaire et 2) Comment, profitant des dénonciations populaires de la politique ruineuse du pouvoir de la Rupture, les zélateurs montent au créneau pour la réhabilitation du système peu performant du CAMES.


Sa démonstration devrait suffire pour situer tout contradicteur honnête à propos de cette structure. La publication de cette Opinion par "La Flamme", organe politique du Parti Communiste indique qu’elle illustre et étaye les positions du Parti en ce que :
1- « Le CAMES fait partie du système colonial français et en constitue un cadre majeur de domination intellectuelle et culturelle française en Afrique au plus haut niveau de la francophonie »,


2- « L’exigence normale est que chaque pays se dote de son propre système d’évaluation et de promotion des enseignants du supérieur ; la proposition d’avoir «un système complémentaire d’évaluation et de promotion de ses enseignants du supérieur » semble aller dans l’ordre normal des choses du point de vue patriotique. »


Mais un débat antérieur soulevé sur les réseaux sociaux, notamment sur le forum « Les Amis de la Flamme » toujours à la suite des déclarations de Patrice Talon a alimenté la polémique justement à propos de ces positions. Un déroulement des principaux éléments du débat permettrait aux lecteurs de se situer.


Le 24 février, le Docteur Benoît Sossou, Directeur de Recherches au Cbrst (CENTRE BENINOIS DE RECHERCHES SCIENTIFIQUES ET TECHNIQUES), publie dans le Forum « Les Amis de la Flamme », « le Guide d’Evaluation des Enseignants-Chercheurs et Chercheurs dans le cadre des Comités Consultatifs Interafricains (CCI) 2024-2028 » avec en dessous le commentaire ci-après : « Ce guide est élaboré de façon participative par toutes les universités et centres de recherche en Afrique, des pays membres du CAMES. Le conseil des ministres de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique de ces pays l’a adopté. Ce guide est prévu pour remplacer celui de 2017 qui prend fin à la prochaine session ».
A cela, suit un commentaire suivant de Rodolphe Sègnanka


« Les critères d'évaluation ne sont ni bons ni mauvais en soi. Une appréciation objective de ces critères d'évaluation doit partir de l'ensemble du système dans ses rapports avec les besoins de la société. Dans le contexte de l'Afrique noire notamment de notre pays, nos universités sont au service des puissances dominatrices. Les enseignants, malgré eux, sont au service de ces puissances impérialistes. Partant, le CAMES est un instrument conçu par elles pour avoir le contrôle sur les universitaires. Le guide d'évaluation s'inscrit dans cette dynamique. Les services rendus à la communauté par un professeur dépendent des objectifs prioritaires de celle-là. Tous les partisans du CAMES soutiendront que ce guide d'évaluation est bon et voudront polariser le débat sur le guide en occultant la raison d’être du CAMES. Comme toujours, ils traiteront toutes les voix non favorables au CAMES d’aigris, de paresseux.»


A cela, Benoît Sossou répond :
« C'est tout le système éducatif qui est extraverti et pourquoi la fixation sur le sous-système éducatif au supérieur ? J'ai servi au secondaire pendant 14 ans. Il y a absence de critères d'évaluation et pourtant les enseignants de ce sous-secteur connaissent des promotions. »
« Comme tout le système est extraverti alors, on cautionne le CAMES ? » rétorque Sèganka.


Sossou Benoît réplique : « Au moins à ce niveau, nous avons défini des critères pour nous évaluer et on peut y apporter des critiques et non faire du gauchisme. Tous les enseignants du supérieur ne sont pas au service de l'impérialisme pour avoir évolué au CAMES ». Et plus loin dans le débat : « Je ne vois pas un corps cohérent et actualisé d'argument contre le mal à évoluer au CAMES mais de petites récriminations d'hommes ayant des raisons personnelles parfois pertinentes non actualisées. »


A Rodolphe Sègnanka qui rappelle que : « Je vous conseille de cesser de faire de la provocation pour préserver vos amitiés avec vos anciens camarades du parti. Vous savez bien que ici c'est un forum de La Flamme, organe d'information du PCB. Vous n'êtes pas sans savoir que le PCB a toujours rejeté le CAMES. Gauchisme, récriminations personnelles sont des expressions pour offenser le PCB et sa direction. Vous n'avez rien à gagner dans ce forum puisque votre combat ne changera pas la position du PCB. » Benoît Sossou répond : « Je n’ai jamais compris que le PCB ne pourrait avoir une position dynamique ».


Arrivé à ce niveau, d’autres internautes sont intervenus dans le débat pour s’exclamer : « Que le PCB ait une position dynamique pour accepter aujourd’hui un instrument de la FrançAfrique qu’il a toujours combattu? » ou encore « C'est une question de principe pour tout patriote : le CAMES est un instrument de la FrançAfrique pour soumettre et continuer à dominer les peuples colonisés par la France… »


Voilà l’essentiel que l’on peut retenir du débat sur ce sujet les 24 et 25 février 2023 sur le forum « Les Amis de la Flamme ».


Dans ce débat, Benoît Sossou soutient 1) que le nouveau Guide d’Evaluation, élaboré de façon participative par toutes les universités africaines indique une dynamique qui change la nature du CAMES et 2) par conséquent, le maintien de la caractérisation du CAMES en tant qu’un instrument conçu par l’impérialisme français pour avoir le contrôle sur les universitaires relève du gauchisme. Et le PCB devrait « avoir une position dynamique. »


Comme l’a justement signifié Rodolphe Sègnanka à savoir que Sossou Benoît n’est pas « le premier défenseur du CAMES et qu’il continue le combat des pro-impérialistes contre les universitaires révolutionnaires », Benoît Sossou, promu Directeur de Recherches au CBRST par le CAMES ajoute et défend avec l’ardeur de nouvel initié et intégré au système (observez qu’il dit « nous avons défini des critères pour nous évaluer » (souligné par nous) que le maintien de la caractérisation du CAMES comme structure pro-impérialiste serait du gauchisme.


Que comme l’a bien souligné son interlocuteur lors des débats, notre grand Chercheur ne sait rien du gauchisme. Pour résumer, comme l’a caractérisé et illustré Lénine dans son ouvrage célèbre « la Maladie infantile du communisme, le gauchisme », le gauchisme est l’attitude ou une théorie politique qui rejette toute participation des révolutionnaires aux structures réactionnaires (syndicats, organisations de masses opportunistes, parlements). Le gauchisme ne porte nullement sur la caractérisation de réactionnaire d’une structure, mais sur l’attitude envers elle et notamment sur le rejet de toute participation des révolutionnaires en son sein.


Telles n’ont jamais été la position du PCB ni l’attitude des communistes. Le PCB, après la caractérisation d’une structure plus ou moins pérenne réactionnaire de masse ne rejette jamais la participation des communistes en son sein afin d’œuvrer justement à en montrer le caractère réactionnaire et aider les masses à mieux la combattre. Dans ce sens, le PCB n’a jamais traité de pro-impérialistes tous les enseignants pour leur promotion dans le cadre CAMES. Le CAMES est la structure imposée par les gouvernements pro-impérialistes français de notre pays pour la promotion des enseignants et chercheurs de l’enseignement supérieur. Il s’impose par conséquent, et pour le moment, à tout enseignant du supérieur voulant faire carrière, tout comme l’instruction en langue française s’impose, pour le moment, à tout parent, tout écolier et tout enseignant. Et il n’est parvenu à l’idée de personne de conseiller le maintien à la maison de son enfant en attendant la révolution, inéluctable, qui instaurera l’instruction à travers nos langues maternelles. Mais le PCB et ses militants révèlent la vérité sur ces institutions, sur leur caractère de domination et combattent ceux-là qui, s’appuyant sur cette réalité de domination, veulent embrouiller les choses, amener les masses à chérir les liens qui enchainent le pays. Il a toujours proposé une structure autonome d’évaluation et de promotion des enseignants pour répondre à nos objectifs de développement. Pascal FANTODJI déjà en 1986 dans son « Adresse du PCD au peuple pour un Dahomey Resplendissant » a proposé l’Académie des Sciences, Lettres et Arts. Seuls les défenseurs de la domination impérialiste, à court d’argument, assimilent la dénonciation du CAMES à du gauchisme ou à la condamnation de tous les diplômés du CAMES, ceci afin de tenter de sortir de leur isolement, surtout en ce moment de la montée du patriotisme panafricain. De même que tous ceux qui dénoncent le CAMES ne sont nullement les derniers de la classe. Au contraire !


Sossou Benoit dans tout le débat estime qu’il y aurait une dynamique au sein du CAMES qui en aurait changé la nature. Le nouveau « Guide d’Evaluation des Enseignants-Chercheurs et Chercheurs dans le cadre des Comités Consultatifs Interafricains (CCI) 2024-2028 » de par son élaboration de façon participative ne ferait plus du CAMES un organe de perpétuation du système colonial français. Est-ce le fait que l’évaluation intègre les avis sur l’implication de l’enseignant chercheur dans la société ou que des étudiants sont appelés également à donner leurs avis ? On ne sait. Mais, cela fait des décennies que l’évaluation des responsables des entreprises capitalistes intègre leur implication sociétale et que les employés sont appelés à évaluer leur supérieur hiérarchique. Cela n’a pas transformé la nature capitaliste de ces entreprises, ni aboli les liens d’exploitation des employés. Le nouveau Guide demeure dans le système et la "dynamique" des réformes sert à tenter de l’adapter face aux dénonciations qui fusent de partout et aux scandales qui éclatent.


La réalité demeure têtue : Nos universités sont extraverties, fermées à nos cultures nationales, à nos langues maternelles où, il n’existe aucune structure nationale d’évaluation et de promotion des enseignants.
Rien n’a donc fondamentalement changé pour que les communistes et les patriotes changent de position face au CAMES. Seul se révèle nouveau au monde et au grand jour, Benoît Sossou défenseur du CAMES, instrument de la FrançAfrique et calomniateur du PCB.

Cotonou, le 09 mars 2023


ZOUNON Kokou

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