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CONFERENCE PUBLIQUE
A PROPOS DE LA SITUATION SOCIO-POLITIQUE NATIONALE ACTUELLE
Cotonou, Chant d’Oiseaux, le 17 août 2018
Introduction liminaire
Par Jean Kokou ZOUNON, Porte-Parole

 

Camarades militants des diverses organisations démocratiques,
Mesdames et Messieurs les journalistes,
Travailleurs et jeunes,

Merci d’avoir répondu à l’appel du FSP pour prendre part à la présente conférence publique au sujet de la situation socio-politique actuelle dans notre pays. Nous savons tous que cette situation est préoccupante, pour ne pas dire angoissante pour le peuple et tragique pour les populations pauvres. Les données sur l’étendue de la faim et de la misère humaine au Bénin, les menaces sur la santé et la vie même des hommes avec l’importation et l’utilisation massives de produits phytosanitaires très dangereux, les résultats toujours catastrophiques des examens scolaires, le verdict du procès contre Laurent Mêtongnon et ses co-accusés, la confirmation de la fin de la démocratie au Bénin avec l’adoption et/ou l’examen de lois par le Parlement, de la Charte des Partis et du nouveau code électoral, sans compter les attaques contre les droits syndicaux des enseignants directeurs et la liberté d’entreprendre des opérateurs économiques et petits producteurs non membres du clan au pouvoir, autant de faits qui creusent chaque jour l’abîme vers lequel est précipité le peuple et notre pays.
Camarades, mesdames et messieurs,
Le journal "l’Economiste" en date du 07 août 2018 indique : « Le rapport « Initiatives P20- Les données pour ne laisser personne de côté au Bénin », en date du 18 juin 2018 aborde la situation des 65 % de la population béninoise faisant partie des 20% des plus pauvres du monde ». Ces 65 % se partagent seulement 3,2 % du revenu national. Voilà qui montre non seulement l’étendue et la profondeur de la misère et de la faim au Bénin, mais également et surtout l’iniquité de la redistribution des fruits de la production et de la croissance au Bénin. Sous le pouvoir de Talon, avec un taux de croissance proclamé de 6% en 2017, l’on crie que le Bénin est en avance sur tel ou tel pays et le Président clame que la situation va bien et ira mieux. Mais pour qui ?

Pour ces 65% des plus pauvres qui ne mangent pas à leur faim, qui sont en insécurité alimentaire ? Sûrement pas. Mais pour les riches au sein du clan, pour leurs serviteurs dont ils refusent même de publier les salaires, certainement oui. Alors pour le FSP, il faut changer la politique du pays, adopter une politique tournée vers l’augmentation des salaires et des revenus des producteurs, la réduction du chômage des jeunes afin de réduire la faim et la misère.
Aujourd’hui, parmi les pauvres qui triment, il y a les paysans producteurs de coton, en fait véritables ouvriers à domicile dans les champs de coton du Prince. Ces cotonculteurs sont exposés aux maladies graves dont on ne les informe même pas. Le monde entier s’est vu confirmer par un tribunal des Etats-Unis dans le verdict d’un procès contre MOSANTO, la multinationale qui produit et commercialise le glyphosate, le caractère hautement cancérigène de ce pesticide. Or, chez nous, ce produit est déversé en quantité pour la culture du coton, sans analyse publique de ses impacts sur l’environnement et les hommes. Pour une tonne de coton, c’est au moins une tonne de ce produit, le glyphosate qui est déversé. Cette année, c’est 900 millions de kilos qui sont prévus et 500 millions de kg déjà réceptionnés depuis avril 2018 par le ministre de l’Agriculture. Un nombre incalculable de paysans, d’enfants et de femmes sont ainsi empoisonnés pour le profit maximum d’une poignée d’hommes pour une spéculation qui n’a rapporté en 2017 dans les caisses de l’Etat sous la Rupture que 11 milliards de francs (Cf. compte rendu du Conseil des ministres du 06 juin 2018).
Vu le caractère hautement dangereux, aujourd’hui mondialement reconnu du glyphosate, par principe de précaution également universellement admis, le FSP, demande la suspension de l’utilisation du glyphosate et une enquête indépendante de l’impact environnemental et sur la santé des hommes dans les zones d’utilisation.
Déjà, une observation des résultats des examens scolaires montre que les taux de succès sont encore plus faibles dans ces zones. Sur le plan national, ces résultats sont en recul par rapport à l’année dernière. Le pouvoir de Talon en profite pour accuser les enseignants et les mouvements de grève. Et sur cette base fausse, il s’en prend aux droits syndicaux des enseignants directeurs d’école à qui l’on veut interdire désormais la syndicalisation. Or, il suffit d’aller dans n’importe quelle école primaire ou secondaire au Bénin, pour constater la ruine de l’Ecole avec le manque criard d’enseignants, de salles de classe, de laboratoires, de bibliothèques, de salles internet, etc. ; il suffit d’aller au domicile de n’importe quel instituteur ou professeur du secondaire pour voir suinter la misère. C’est pour la fin de la ruine de l’Ecole que ces enseignants, encore une fois en 2018, ont organisé des grèves auxquelles le pouvoir de Patrice Talon est resté sourd après avoir réprimé les acteurs. Le responsable des résultats catastrophiques aux examens, c’est le pouvoir de Talon qui depuis deux ans fait tout pour asservir les enseignants et aggraver la ruine de l’Ecole. Le FSP exige la satisfaction des revendications des enseignants, le respect de leurs droits syndicaux et la revue de toute la politique éducationnelle du pays.
Au lieu de s’attaquer à ces problèmes par une politique qui priorise la production nationale et la vie des hommes, le pouvoir s’entête dans la mise en œuvre de choix économique et d’infrastructures dont la finalité se révèle la course au profit des hommes d’affaires du clan au pouvoir. Le pouvoir annonce par exemple la mise en œuvre du projet d’asphaltage des rues dont le coût s’élève en moyenne à 1,4 milliard franc cfa par kilomètre au Bénin du pouvoir de la Rupture, soit plus de trois fois dans les pays de la sous-région. Tenez, à Lokossa, le premier lot d’asphaltage de 10,70 km couterait 21,8 milliards franc cfa, soit plus de 2 milliards par km (Cf le journal "La Nation" du 06 août 2018). 22 milliards pour les rues de Lokossa alors que l’Hôpital de la ville, le Centre hospitalier départemental (CHD) du Mono-Couffo situé dans la ville, les collèges et écoles manquent de personnels et sont sans équipements suffisants et adéquats ; alors, ne peut-on pas comprendre que les raisons qui sous-tendent un tel choix et de tels coûts exorbitants sont d’ordre financier ?
Au lieu d’écouter les cris de misère et de justice du peuple, le pouvoir de Talon s’enfonce dans la politique de despotisme voire de tyrannie. Y-a-t-il une autre caractérisation des différentes décisions prises contre la liberté de presse avec la suspension arbitraire et sine die du journal "La Nouvelle Tribune", ou le verdict de condamnation sans aucune preuve de Laurent Mêtongnon à la peine maximale de cinq ans ? Beaucoup de démocrates ont déjà condamné cette décision qui confirme que la détention de Laurent Mêtongnon et de ses co-accusés est purement politique car « La décision intervenue ce 31 Juillet 2018 dans l’affaire des prévenus de la CNSS/BIBE n’a rien de juridique, car ne respectant aucun des principes du droit pénal : le principe de présomption d’innocence, le principe selon lequel « la liberté est la règle, la détention, l’exception » et surtout le principe que « la charge de la preuve incombe au demandeur », c’est-à-dire à l’accusation et que « l’on ne peut condamner sans preuve. ». Cette décision confirme qu’Il n’existe plus de justice indépendante sous le pouvoir de la Rupture. (Philippe Noudjènoumè). Le FSP s’insurge contre cette décision barbare, exige la libération pure et simple des détenus politiques, Mêtongnon et ses co-accusés et appelle tous les démocrates à continuer leur lutte à cet effet.
Cette décision rentre dans la panoplie des mesures du pouvoir pour l’instauration complète de la dictature au Bénin et pour faire des populations du Bénin des esclaves politiques de Talon. Ainsi est-il de la loi n° 2018-23 portant Charte des partis politiques en République du Bénin et du code électoral en discussion au Parlement. Tout le peuple connaît la teneur de ces deux lois organiques. La plus grave de ces deux lois liberticides est celle portant Charte des partis qui institue un ancrage, dès sa création, de tout parti politique, dans chaque commune du Bénin, comme si notre pays était devenu une fédération de communes. Le multipartisme intégral proclamé dans la Constitution (dès son préambule) est donc nié. Le droit d’association du citoyen en parti politique est piétiné. Et lorsque les droits politiques du citoyen sont piétinés, il n’y a plus de démocratie. A la place, on veut soumettre le peuple à une ploutocratie, au pouvoir des riches mafieux : une caution de 200 millions de francs cfa (305.000 Euros) par liste contre 8,3 millions auparavant pour les élections législatives ; 250 millions (380.000 Euros) pour les candidats aux élections présidentielles, ceci dans un pays où le smig est de 40.000 frcs cfa (60 Euros) et où plus de 65 % vivent sous le seuil de pauvreté. Le tripatouillage des listes électorales avec le Ravip sournoisement en œuvre achèvera de donner la majorité qualifiée pour une révision formelle de la Constitution déjà détruite par ces lois et les décisions de Djogbénou.
Après avoir fait des producteurs du Bénin des employés de la société Talon et compagnie, on veut faire des citoyens, des esclaves politiques des riches mafieux. Tous les acquis consacrés par le Renouveau démocratique sont épuisés. Toutes les décisions majeures de la Conférence nationale relatives aux libertés démocratiques sont ainsi jetées à la poubelle.
Le FSP rejette ces lois anticonstitutionnelles portant Charte des partis politiques au Bénin ainsi que celle en discussion sur le code électoral. Il exige le maintien en l’état des lois existantes. Il appelle alors le peuple à s’organiser partout pour la résistance au pouvoir tyrannique de Patrice Talon et pour la reconquête de la démocratie au Bénin.
Nous ne cesserons jamais de répéter, jusqu’à l’abolition définitive de l’autocratie, l’appel ci-après : Que de partout, chaque citoyen qui souffre et se plaint de la gouvernance autocratique, de pillage, d’apatridie et de famine du pouvoir de Talon, refuse d’accepter l’inacceptable que l’on veut lui faire subir dans son coin, et alors l’ensemble de ces refus aboutira immanquablement, comme un torrent qui emporte tout, à la libération du peuple du joug autocratique de Patrice Talon.
Alors, des Etats généraux du peuple se réuniront et institueront une gouvernance nouvelle, de probité et de patriotisme.
Enfants du Bénin, debout pour que Vive la démocratie, pour que survive le Bénin !

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