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A PROPOS DES
MONUMENTS A LA GLOIRE DE L’AUTOCRATIE DE MATHIEU KEREKOU

 

Depuis un certain temps une polémique court autour de la destination de l’ancien domicile de feu Mathieu KEREKOU à Cotonou. HOUHOU Ali, l’ancien Chef des nids des jeunes mouchards au service du dictateur KEREKOU et qui en réclame tout l’héritage politique en tant qu’animateur de la Fondation Mathieu KEREKOU en est le principal protagoniste. Il appelle à des pétitions à cet effet. Faut-il transformer le domicile (partiellement ou en totalité) en Jardin « Saint Mathieu » ou en Musée Mathieu KEREKOU ? Et à la faveur de cette bataille autour du devenir de cet ancien bâtiment colonial affecté au logement des officiers, refait surface la question de la mémoire de Mathieu KEREKOU.
A- S’agissant du sort du domaine dit des filaos, il est de notoriété publique que tous les clans de la Haute-Bourgeoisie se servent de la parcelle de pouvoir qu’ils détiennent pour s’arroger, s’attribuer des parts importantes du patrimoine public.

C’est à qui s’emparera du maximum le plus rapidement possible, que ce soit un patrimoine immobilier, mobilier ou financier. Le Gouvernement Militaire "Révolutionnaire" (GMR) de Mathieu KEREKOU s’est très tôt (1974) illustré par le partage en Conseil des Ministres des « vons » de Cotonou, ce qui a eu pour conséquences, entre autres, la disparition des espaces de jeux sportifs de jeunesse dans la ville de Cotonou. La suite, on la connaît. De ce régime de KEREKOU à celui de Patrice TALON, avec des célébrités comme DASSIGLI (Préfet ou Ministre) et TOBOULA, le pillage et le bradage aux parents, amis et maîtresses s’est poursuivi jusqu’à ce jour, avec comme corollaire l’impunité des auteurs. A cet égard, la récente affaire dite de « Togbin » en est une illustration, avec la CRIET qui envoie DASSIGLI dormir chez lui et TOBOULA en villégiature. Le « dégagement des domaines publics » avec grand tapage de Talon-Toboula n’a finalement visé que les pauvres dames revendeuses et petits artisans de bord de rue laissant repus, visibles et insolents, les nantis qui se sont véritablement arrogés des domaines publics sur lesquels des buildings narguent les démunis.
Il faut donc craindre que cette querelle apparente n’ait pour l’instant dévoilé qu’une partie des intentions réelles des différents protagonistes dont le résultat provisoire ne peut être que défavorable au peuple et au bien public. Le peuple doit donc s’en tenir à une position de veille permanente en trois points :
1- Il est hors de question que ne serait-ce qu’un m2 du patrimoine foncier public soit définitivement bradé ;
2- Tous les biens publics volés ou usurpés devront un jour être récupérés, que les auteurs soient encore vivants ou non ;
3- une statistique et un répertoire de tous les crimes économiques doivent être tenus, publiés et transmis de génération en génération.
Tout ceci afin qu’aucun crime économique ne soit impuni.
B- S’agissant de l’érection de monuments à la mémoire de Mathieu KEREKOU, il s’agit de véritables provocations à l’endroit du peuple, orchestrées par les falsificateurs de l’histoire dont Ali HOUDOU. En effet, la chronique en raccourci du règne de Mathieu KEREKOU se présente ainsi :
Après son arrivée au pouvoir le 26 octobre 1972, dissolution de toutes les organisations de jeunesse, assassinat du capitaine Michel AIKPE, dissolution de toutes les organisations syndicales indépendantes, création d’un parti unique, d’une centrale syndicale unique, d’une organisation de jeunes unique, d’une organisation de femmes unique, etc. suppression du droit de grève, imposition d’une Constitution barbare, arrestations massives et déportation en 1975, 1976, 1979, 1982, 1985, 1986, 1988, 1989 de milliers de jeunes, de femmes, syndicalistes, paysans, ouvriers, artisans, bref de tous ceux qui n’étaient pas d’accord avec son pouvoir ou ne manifestaient pas bruyamment pour le soutenir. Il fut l’instigateur de crimes de masse contre les dignitaires et adeptes des religions traditionnelles avec la fameuse lutte contre la sorcellerie. Comme si cela ne suffisait pas, la période a été jalonnée d’assassinats crapuleux en prison ou dans la rue sous l’ordre donné ouvertement de tirer à vue et sans sommation sur tout manifestant: Parfait ATCHAKA, Rémi AKPOKPO GLELE, Luc TOGBADJA, ARABAT, Serge GNIMADI, etc. Il traitait les jeunes qu’il massacrait de crapauds.
Tous les commissariats, camps militaires, prisons du pays étaient remplis de détenus, transformés en des lieux de tortures de personnes arrêtées au seul motif d’avoir exprimé ou diffusé une opinion contraire au pouvoir. Les têtes des fugitifs les plus emblématiques étaient mises à prix avec leurs photos publiées dans les journaux du pouvoir, comme ce fut le cas des Issifou ALASSANE, Thérèse WAOUNWA, Denis SINDETE, Aboubacar BAPARAPE, Osséni AGBETOU.
En face de cette barbarie s’est dressé un héroïsme populaire. A partir du moment où KEREKOU a déclaré la guerre au peuple, le peuple ne lui a laissé aucun répit. Tout le peuple s’est mobilisé pour créer des espaces de liberté. Des organisations de jeunes, de paysans, des syndicats de travailleurs salariés, des comités d’actions se créaient dans la clandestinité et agissaient publiquement. Plus on arrêtait plus il manifestait, il écrivait, il se battait. Il affichait sa volonté de renverser le régime pour mettre fin aux assassinats et arrestations. Les assauts populaires ont gagné les soldats et l’armée. En 1987 et 1988, plus de trois coups d’état ont été déclarés par le pouvoir avec des arrestations des soldats et officiers. Le général dictateur était nu. Mais il fit tout pour se maintenir : financièrement, décision d’importation de déchets nucléaires en 1988 ; politiquement, organisation d’élections présidentielles truquées en juin 1989 pendant que le peuple était dans la rue depuis janvier 1989. Mais le peuple tenant debout, jusqu’au 11 décembre 1989 où il est apparu que le flot protestataire ne pouvait plus être endigué. Même la Conférence Nationale de février 1990 a été organisée pendant que les populations étaient dans les rues et que les Comités d’Action occupaient les unités de production et les services.
C’est donc battu et contraint que KEREKOU a dû opérer une feinte, aidé par Mgr de Souza qui a donné l’impunité au Chef tortionnaire ; ce qui lui a permis et revenir par la suite, avec l’aide de la FrançAfrique, se venger des humiliations subies. Même là, ses deux mandats (de 1996 à 2006) ont été les plus dévastateurs en termes de planification, d’instigation et d’impunité de scandales au sommet de l’Etat (Affaires Sonacop, Titan, Défi emploi jeunes, Hamani, assassinat juge Coovi, etc)
Ce n’est donc ni la magnanimité ni la bonté de cœur de KEREKOU qui nous a octroyé les libertés. Elles ont été conquises au prix du sang des jeunes d’hier qui ont sacrifié leur liberté pour que les jeunes d’aujourd’hui vivent et travaillent en liberté. Au lieu d’un musée à la liberté et à la bravoure, au sacrifice et à l’héroïsme, on veut ériger des monuments à l’autocratie et à la barbarie.
Il y a donc à magnifier : ou la barbarie d’un homme sans cœur et d’un régime autocratique, ou l’héroïsme d’une jeunesse qui a donné sans compter. HOUDOU Ali et compagnie ont choisi la barbarie. Et pour cause ! HOUDOU Ali était le chef de l’organisation de la jeunesse du pouvoir, (OJRB), un nid d’indicateurs de la police qui dénonçaient les jeunes à arrêter et torturer. Il a applaudi la tuerie en mai 1985 de l’élève Parfait ATCHAKA et appelait à mettre hors d’état de nuire tous les combattants de la liberté traités par lui d’anarcho-gauchistes. C’est pourquoi aujourd’hui, lui, Ali HOUDOU et ses compagnons se sont transformés en effaceurs de mémoire, en falsificateurs de l’histoire afin de préserver l’impunité des tortionnaires et des criminels politiques.
Ces effaceurs de mémoire sont les précurseurs et les inspirateurs des "klébés" d’aujourd’hui, les précurseurs des Léandre Wilfrid HOUNGBEDJI et autres Agapit Napoléon MAFORIKAN.
"Puisque KEREKOU a pu faire tirer à vue sur des enfants à mains nues, puisque KEREKOU a pu faire torturer à mort dans ses prisons, puisque KEREKOU a pu emprisonner des milliers d’opposants sans jugement et être quand même porté en triomphe par des laudateurs, alors TALON peut supprimer toutes les libertés, emprisonner à tour de bras et tuer dans la rue sans sommation. Il sera également porté en triomphe et on érigera des monuments à sa gloire ou à sa mémoire. Faites peur, tuez toujours plus ; on vous respectera ; on vous adorera."
Lorsqu’on érige un musée à l’honneur d’un grand chasseur on y expose les trophées (cornes, têtes, fourrures) du gibier abattu par lui. Dans le musée pour KEREKOU, qu’y mettront HOUDOU Ali et compagnie : l’effigie de Michel AÏKPE, la photo des geôles du PCO ou de Sègbana ? la tête de Rémi AKPOKPO-GLELE ? Celle de Luc TOGBADJA ? ou celle de Parfait ATCHAKA ? Parce que ce sont là, les grands faits d’armes du Général !!!
Il est donc hors de question qu’un édifice public porte le nom de Mathieu KEREKOU, qu’il soit stade, école ou université, jardin ou musée ; que ce soit ouvertement et insolemment Mathieu KEREKOU ou discrètement et de manière plus perfide « Saint Mathieu ». Le peuple, un jour, saura les défaire.
Travailleurs et jeunes du Bénin, soyez les dignes héritiers des luttes du passé ; construisez et écrivez votre histoire d’aujourd’hui, héroïque et plus victorieuse que celle d’hier afin de ne point baisser la tête devantvos enfants qui pourraient vous demander ce que vous avez pu faire devant la barbarie. Ecrivez votre histoire, brave et héroïque afin que les HOUDOU, les Léandre HOUNGBEDJI et autres Agapit MAFORIKAN ne soient point chroniqueurs d’une histoire tronquée et avilissante pour vous.
Cotonou, le 7 décembre 2019
Le Parti Communiste du Bénin
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